Quels ont été les effets de la crise sanitaire sur l’organisation du travail et comment avez-vous géré cette crise en tant que DRH ?
Nous avons déployé le télétravail partout dans le monde pour tous les postes qui le permettaient. Cela a été relativement rapide et simple à mettre en œuvre, la pratique du télétravail et les habitudes de travail à distance étaient déjà bien ancrées dans l’entreprise. Ces modes de fonctionnement n’étaient pas vécus comme un changement majeur, mais dans ce contexte inédit nous avons décidé de mettre en place un accompagnement renforcé de prévention des Risques Psycho-Sociaux.
Nous avons créé un support pédagogique pour les managers sur le management à distance tenant compte de la situation particulière que nous vivions. Nous avons également au travers d’un Pulse Survey adapté les dispositifs.
Nous avons mis en place de nombreuses actions sur le thème de la santé et de la convivialité (sport, alimentation, team building, animation virtuelle…).
Nous avons eu une attention particulière pour les 1600 jeunes alternants et leur avons donné la possibilité de venir sur site s’ils le souhaitaient. Nous avons, notamment, créé un réseau social d’alternants et avons accompagné leurs managers et tuteurs afin qu’ils maintiennent une relation de proximité.
Durant cette période, les équipes RH ont été très présentes pour accompagner les salariéset le management. Nous avons beaucoup communiqué, veillé à respecter les rituels managériaux, favorisé les moments de convivialité afin de gommer le plus possible cette perte de lien et de rapports spontanés. Nous avons été particulièrement vigilants aux situations individuelles sensibles et aux problématiques de surcharge de travail.
Quels enseignements tirez-vous de cette période, qu’est ce qui va changer dans l’organisation du travail ?
Nous avons gagné 5 à 10 ans sur la transformation digitale. Les plus réfractaires au télétravail sont aujourd’hui convaincus que ça fonctionne et ont pu constater aucune baisse de productivité.
Comme dans toute transformation, nous sommes confrontés à cet effet de balancier entre le tout télétravail et le tout présentiel.
Ce contexte nous impose de créer davantage de flexibilité dans l’organisation du travail, tout en maintenant le lien social. Face à ce constat nous envisageons d’élargir le télétravail à 3 jours par semaine (versus 2 auparavant). Afin de répondre aux attentes des salariés, nous prônons pour tous les métiers où l’activité le permet une forme hybride du travail. L’espace de travail est repensé, avec la réduction des surfaces immobilières et la création de lieuxde créativité.
Nous sommes confrontés lors des recrutements et de la part des salariés à de plus en plus de demandes de délocalisations géographiques. Ce contexte a fait repenser les modes de vie des familles, c’est un fait nouveau dont il faut tenir compte avec les conséquences que cela suppose sur le plan financier et organisationnel. Mais cela fait désormais partie des critères qui viennent renforcer l’attractivité des entreprises.
Quelles conséquences ce contexte a t’il sur le rôle des leaders/managers ?
Cette période a libéré le rapport au travail et à l’entreprise. Le manager est nécessairement moins dans le contrôle. Le mode contrôle est plus organisé, moins informel ce qui affaiblit la pression et le champ de contraintes des salariés.
Les soft skills prennent une place encore plus importante dans ces nouveaux modes de travail. Les critères d’évaluation et le développement des compétences sont à repenser.
Le rapport au temps évolue également. Les managers doivent être plus vigilants à la charge de travail et au temps de déconnexion.
Plus que jamais, l’exemplarité managériale, l’application des bonnes pratiques et des bons comportements sont essentiels pour engager, protéger et fidéliser les salariés.
Quelles sont les nouvelles attentes dans les process de recrutement et de nomination des managers et cadres dirigeants ?
La capacité à animer un collectif et à avoir du leadership dans des environnements complexes et incertains sont les priorités.
Le management des jeunes générations est aussi au cœur de nos préoccupations. En effet, les jeunes ont besoin de plus de présence en entreprise et de proximité avec le management.
Par ailleurs, savoir manager en mode hybride, faciliter la flexibilité au travail, créer un collectif de travail, favoriser la convivialité sont des facteurs clefs de rétention des talents, notamment des jeunes générations.
Pour conclure, je dirais que le leader aujourd’hui doit définir le cadre, accompagner et soutenir les équipes, créer la confiance, renforcer la responsabilité et favoriser les conditions d’innovation et de créativité.